lundi 2 mai 2011

Pina Bauch



Pina Bauch



Le film de Wim Wenders est une merveille. Le cinéma en relief dans l'oeil de Wim Wenders ouvre des perspectives inédites. En adoptant cette technique, le réalisateur des Ailes du désir a inventé une façon brillante de donner corps à la danse au cinéma.

Pina bauch, balance nos cœurs au fil des mouvements des corps.  Plongé sur la scène, nous avançons aux pas des danseurs. La danse, dépouillée de tout artifice, dans la splendeur des gestes du corps qui articule les mots sourds. 
Les danseurs parlent, bouche




muette, mots choisis, pausés sur l’enseignement de Pina Bauch, les yeux dans les yeux. L’intensité du regard souligne la vérité de leur être. Car au fond, Pina Bauch sait extraire leur singularité. Sa danse fouille, secoue,  cherche, retourne les âmes.
Une danseuse raconte :
« Au bout de vingt ans, elle m'a fait une remarque, pour la première fois. Elle m'a seulement dit : “Sois plus folle ! ” »

Une autre se souvient de « continue à chercher ». Puis plus rien, malgré les heures qui se succédaient à ses côtés. Un autre, encore, raconte qu'un soir de filage, alors qu'il se sentait en difficulté, elle lui a glissé sur le fil :
« N'oublie pas, tu dois me faire peur. »

Une danseuse parle, elle si timide qu'on a peine à imaginer comment elle et Pina pouvaient bien communiquer. La chorégraphe est un jour venue la voir, après des mois de mutisme, pour lui demander seulement :
« Pourquoi as-tu si peur ? Je n'ai rien fait. »

« Dire presque rien ne signifie pas ne pas accompagner »
« Pina fonctionnait beaucoup sur les qualités divinatoires de ses interprètes », ajoute Raphaëlle Delaunay. Cette dernière évoque « les consignes vastes » de la chorégraphe mais s'étonne :
« Dire presque rien ne signifie pas ne pas accompagner. Ce n'est pas parce qu'on débite des paroles qu'on se sent moins seul. Il y avait de la bienveillance, de l'amour peut-être, même si elle n'était loquace avec personne. »

« Elle parlait beaucoup par métaphore, mais fonctionnait surtout sur son magnétisme personnel. Elle n'était pas à un endroit d'autorité. Seuls de grands chorégraphes ont cela : Béjart, Kylian. Eux disent très peu parce qu'ils dégagent beaucoup. »
Rythmé par les conseils de la chorégraphe les danseurs reviennent sur le lien qui se tisse entre eux.

« Son emprise physique et psychique était très forte »
« Elle te donnait toujours l'impression que tu es plus qu'un être humain. »
« Un grand grenier avec plein de choses dedans. »
« Elle m'a donné du vocabulaire. »

Tout le long du film, les corps racontent la vie et la complexité  de l’âme 



humaine. Ils s’élancent, tombent,  au bord d’eux même, les danseurs funambules exaltent leurs sensations émotions. Une énergie fugace, parfois suspendu à un fil, évoque les soubresaux et les tornades intérieures. Les corps, au ralenti, répètent la litanie de la vie.  Parfois l’angoisse pointe dans la ritualisation des mouvements. Pina Bauch n’a pas peur du vide. Elle joue avec et condense, mélange les émotions : la douceur, l’amour, la confiance, la colère, la rage, la prison intérieure….






Toujours avec panache, sensualité et humour. Les éléments naturels et les vêtements fluides soulignent les courbes des danseurs. Le vent, la terre, l’eau, la transparence renforce le côté extatique des pauses.  Pina Bauch (et la réalisation de Wim Wenders) nous tend ce  miroir entre poésie et tragédie,  à la frontière entre soi et l’autre,  une invitation parfois décalé à sourire  à nos déserts intérieurs.   

La musique du film est bien sûr celle que Pina Bausch choisissait pour ses spectacles et surtout celle qui l’inspirait : cela va de Bartok, Purcell, Wagner,  à Gustavo Santaollala, bref les musiques sont aussi variées que les danses et n’en finissent pas de nous emporter.

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